Jacqueline Muguet sera peut-être la surprise des prochaines élections municipales. En tout cas, elle n'en doute pas un instant, et se proclame déjà future maire de Nice. Il faut avouer que son programme, volontairement iconoclaste, voire parfois utopique, apporte une agréable bouffée d'air à cette campagne quelque peu sclérosée.

"Oh! C'est pas un peu fini vos conneries" est l'intitulé du dit-programme, le bonheur en est l'objet.

Jacqueline Muguet est aussi niçoise que la socca, les double files et le clientélisme, à tel point qu'elle fut élue à l'age de 15 ans Miss Pan-Bagnat, sous les regards envieux de ses copines. Elle se souvient encore du baiser huileux qu'elle posa délicatement et avec amour sur la joue de Jacques Médecin venu lui remettre son prix : elle n'était pas encore ouverte à la politique. C'est une autre histoire de pan-bagnat qui révélera, nous dit-elle, "son vrai destin". C'est du moins ce qu'elle raconte, sans qu'il nous soit possible de faire la part de la vérité et celle du folklore inventé. "Je préparais des pan bagnats pour le Comité des fêtes de la Ville de Nice quand je me suis aperçu avec horreur que certaines de ces délicieuses spécialités niçoises contenaient de la mayonnaise, d'autres de l'harissa. Je me vois encore, la mayonnaise dégoulinant sur ma main. J'ai eu comme une révélation, j'ai quitté mon emploi àla mairie et je me suis lancée àcorps perdu dans la politique."

Depuis, elle a fort heureusement retrouvé son corps, par ailleurs fort joli. Jacqueline Muguet s'impose rapidement comme l'élément fédérateur de tout ceux qui militent pour l'identité culturelle niçoise, à tel point que certains la soupçonneront d'être l'auteur de l'Aigle déplumé, ce qu'elle dément.

Autour d'elle se crée l'association des Amis de Jacqueline Muguet, chargée de propager la bonne parole : "Fais-toi la ville que tu veux vivre". La présidente en est Roseline Mouletta, la trésorière et gardienne du trésor Aline Rataoui, Guisepina Pina est (très très) attachée à la culture, Josette Conrad, chanteuse de son état, est naturellement la porte parole, et Edgard Rossignol est responsable des questions essentielles.

Avec d'autres encore, ils se chargent de diffuser le programme de la future maire de Nice, sous la forme originale d'images Panini comprenant chacune une proposition : quand vous avez la collection complète, vous avez par là-même le programme de Jacqueline Muguet. En voici quelques extraits :

• En période touristique, chaque habitant de la ville recevra un salaire de figurant, et en contre-partie, il se montrera agréable et pas dérangeant pour les touristes. Le mieux étant quand même qu'il ne se montre pas du tout (proposition 12).
• "Fai pas lo morre, fai l'amor"(proposition 11).
• "Lou 13ème mois fas pas caga, fai lou que voudras" (proposition 13). Dans un langage certes cru, Jacqueline Muguet ne propose pas moins que l'instauration d'un 13ème mois que l'on pourrait glisser quand on veut dans le calendrier pour rencontrer ses voisins ou faire des choses utiles.

Ce programme est effectivement attrayant, malgré, ou bien grâce, à ses côtés parfois extravagants. Mais Jacqueline Muguet est moins volubile lorsqu'on lui demande comment elle compte financer sa quête du bonheur pour les niçois (et les niçoises). Elle renvoie la balle à Edgar Rossignol, l'austère économiste de Mme Muguet : "La ville pourrait racheter l'ancienne ville de Jacques Médecin et la transformer en lupanar pour accueillir convenablement les délégations internationales et fortunées. On a bien vu lors du Sommet Européen qu'une telle structure faisait cruellement défaut à Nice, et les délégations européennes ont dû se contenter des filles extra-communautaires de la Promenade des Anglais. Je n'hésite pas quant àmoi à voir là la cause de l'échec de ce Sommet. Juste retour des choses, Lou Soubran, la villa de Médecin, qui a tant coûté au contribuable niçois, lui rapporterait enfin de l'argent. Et les fonds ainsi récoltés serviraient à financer le programme de Mme Muguet." Au-delà des problèmes éthiques et juridiques que pose la réouverture d'une maison close àNice, on peut raisonnablement douter de la crédibilité d'un tel mode de financement.

Gilles Mortreux

Un des points de la campagne 2001 de Jacqueline Muguet : Le bonheur pour tous les Niçois et même pour les autres... Le bonheur et l'amour, toutes les Niçoises et tous les Niçois y ont droit.

Les riches seront déchargés d'une partie des soucis qui encombrent leur vie: l'argent. En payant plus d'impôts, ils seront plus heureux et pourront vivre avec la conscience plus tranquille. Ils auront contribué à améliorer la vie des autres. Ils leur doivent bien ca.

Quant aux autres, justement, ils ne paieront rien ou très peu et profiteront de l'argent des riches. Comment allons nous dépenser l'argent que les riches auront donné à Jacqueline Muguet et les richesses que dans le bonheur nous produirons? C'est une bonne question. Nous donnerons des moyens àtous ceux qui veulent rendre la vie des gens plus agréable. La première condition est donc que ceux qui sont payés pour rendre la vie des gens plus agréable aient eux-mÍme une vie très agréable. Nous remplacerons donc tous les employés municipaux mécontents par des employés municipaux contents de rendre service aux niçois. Il n'est pas question de donner l'argent des riches à des râleurs... La deuxième condition est que les employés de Jacqueline Muguet donnent du plaisir à tous les Niçois. Nous remplacerons toutes les activités municipales qui ne procurent aucun plaisir par des activités qui donnent vraiment du plaisir. La troisième condition est que les espaces municipaux dont les employés municipaux s'occupent soient sans délai transformés en lieux de plaisir et d'amour...